Question orale du 04/05/2015 à COLLIN René, Ministre de l’Agriculture, de la Nature, de la Ruralité, du Tourisme et des Infrastructures sportives, délégué à la Représentation à la Grande Région

Monsieur le Ministre, on a pu lire récemment, dans la presse, la grogne d’agriculteurs d’Hondelange dont des terres agricoles seront expropriées pour raison d’utilité publique. L’intercommunale Idelux a un projet d’implantation d’un zoning artisanal et industriel sur les terres agricoles expropriées, environ 45 hectares. Depuis des années, il existe une certaine pression sur la zone agricole, mais force est de constater que ce qui rogne la surface agricole utile, c’est bien plus l’habitat que les zones d’activité économique.

Je souhaite lier cet exemple avec les discussions en cours sur la gestion du foncier en Wallonie et sur la réflexion, sur l’extension d’un droit de préemption des pouvoirs publics.

Une délégation du Parlement wallon a récemment visité la Safer Flandres-Artois en France qui se positionne comme un outil de la gestion du marché foncier rural. Elle peut exercer un droit de préemption prévu par le Code rural pour motif d’intérêt général.

Je souhaiterais savoir qui arbitre un conflit – le terme n’est pas toujours approprié – lorsqu’il y a une concurrence entre droit de préemption et/ou droit d’expropriation, lorsque cela se présente par exemple entre une Safer et un projet d’implantation de zoning ? Comment cela est-il arbitré ? Comment envisageriez- vous cet arbitrage en Wallonie ?


Réponse du Ministre

Madame la Députée, votre question relève plus de l’aménagement du territoire que de la politique agricole et de la gestion de l’espace foncier agricole.

Les deux matières sont intimement liées sur le terrain.

La législation wallonne – a contrario du système français que vous évoquez – scinde l’aménagement du territoire qui définit l’affectation d’un type d’activité pour une zone, de l’usage de cette zone qui relève, dans le cas de zones agricoles, des politiques agricoles proprement dites.

Dans la Déclaration de politique régionale, le Gouvernement wallon s’est engagé à être attentif à préserver les surfaces affectées à l’agriculture.

Mon collègue, M. le Ministre Di Antonio, dans le cadre de l’évolution du CoDT, et moi-même, dans le cadre de l’évolution du cadre législatif relatif au foncier agricole, y sommes particulièrement attentifs.

Actuellement, environ 2 000 hectares sont chaque année soustraits de la superficie agricole utile, ce qui représente un phénomène lent, mais néanmoins préoccupant. Comme vous le faites justement remarquer, seule une partie de ces biens sont affectés à la création de zones d’activité économique, d’autres étant affectés à l’habitat, au développement de zones d’extraction ou à d’autres fins, parmi lesquelles on peut citer les activités de loisirs, dont la détention d’animaux, comme des chevaux de loisir, par exemple. C’est bien connu.

Lorsqu’une commune ou un fonctionnaire délégué reçoit une demande de permis en lien avec un projet en zone agricole, il doit recueillir l’avis de la Direction du développement rural de la DGO3.

Plusieurs de ces projets concernent l’expropriation de terres agricoles pour raison d’utilité publique, par exemple, inscription de zone d’activité économique au plan de secteur.

Dans tous les cas, et c’est sa responsabilité, la Direction du développement rural veille à ce que ses avis défendent l’activité agricole et le paysage.

Elle se base principalement sur les considérations suivantes :

  •  l’expropriation des terres agricoles est irréversible. Les terrains imperméabilisés (constructions, parkings,…) ne pourront plus jamais être dédiés à l’activité agricole ;
  •  la qualité des sols agricoles est à prendre en compte afin de ne pas gaspiller les sols les plus fertiles ;
  •  la viabilité des exploitations agricoles concernées est très importante. Le nombre d’exploitants concernés ainsi que l’importance de l’impact du projet sur leur exploitation sont pris en compte.Par contre, dans l’étude d’incidences des projets, l’impact du projet sur l’activité agricole est rarement évalué.

Or, cette activité est une activité économique importante de notre Région qui se doit d’être mieux prise en considération.

Vous avez évoqué le déplacement de la commission à la Safer Flandres-Artois. Je ne vais pas revenir ici sur la manière dont ils gèrent là-bas les éventuels conflits d’usage du territoire. S’il est vrai que l’examen du mécanisme de fonctionnement des Safer peut constituer une source d’inspiration, il convient de rappeler que notre situation légale est assez différente de celle de nos voisins français où toutes les transactions se rapportant à des biens ruraux sont soumises à un droit de préemption des différentes Safer territorialement compétentes.

En Wallonie, différents droits de préemption et d’expropriation existent, en lien avec différentes politiques. C’est au cas par cas, dans l’instruction des dossiers, que l’impact sur l’activité agricole est analysé. Si par le passé, la terre agricole a parfois été considérée comme une réserve foncière, l’importance de la préservation de celle-ci est maintenant prise en compte dans les politiques d’aménagement du territoire.

Je rappelle, dès que j’en ai l’occasion, que l’agriculture est une activité économique dont la terre est un facteur de production essentiel et nécessaire qu’il faut préserver. À chaque fois que cela est possible, d’autres solutions de l’usage agricole doivent être recherchées pour le développement d’autres activités économiques qui nécessitent de l’espace.


 L’enregistrement mp3

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